Jordanie Partie 2 – Petra

Au retour du bar, en faisant un peu de small talk avec les deux gars au comptoir de l’auberge, j’ai appris que vu que le lendemain est un vendredi, les autobus publics n’opèrent pas. Oh shit, une estie de chance ils m’ont dit ça, moi qui prévoyais dormir un peu et prendre un des supposément nombreux minibus quotidiens.

Il y a la compagnie nationale Jett qui a un bus cependant, à 6h30. Je vais donc sur leur site pour acheter un billet, et quand j’arrive pour payer avec ma carte de crédit, je reçois juste un message d’erreur. Ça dit que le bus est plein, même si ils annonçaient qu’il restait deux places. Peut-être que quelqu’un a sauté sur les deux billets restants et les a payés pendant que je rentrais mon info? Zut. Légèrement désespéré, le gars du comptoir me dit qu’il y a une section sur le site de Jett, “Services for tourists”, qui vend des billets sur le même bus, mais pour 18 dinars au lieu de 10 (et le bus local, lui, coûte 5). Je pèse mes options, j’ai aucunement le goût d’encourager une telle marde, mais si j’attends le sur-lendemain, ça chamboulera mon horaire en plus de me faire perdre de l’argent pour le lit que j’ai réservé. Donc je paye la taxe Crosse-Touriste, et le lendemain je me lève à 5h et je marche d’un bon pas dans la noirceur totale et les rues désertes pour arriver à la station de bus.

Le bus s’avère être à moitié vide. Ah, Jordanie. Je me demande si ils ont un Ministère de l’Arnaque, avec des consultants et des fonctionnaires qui discussent de nouvelles façons d’extraire le plus d’argent possible des infidèles qui se font débarquer à coups de Boeing 767 entiers dans leur pays.

Après deux heures et quelque, on arrive à notre destination, le portail d’entrée du site de Petra. J’ai aucunement le coeur à dealer avec les parasites qui me swarment dessus ou me crient de leur fenêtre de taxi, et anyway mon auberge est juste à une quinzaine de minutes de marche. Il faut quand même que je monte de 100 mètres d’altitude via une route en S, dans le bled tranquille (passé le Ground Zero des parasites) et franchement très joli de Wadi Musa.

J’arrive trop tôt pour prendre possession de mon lit, après ce départ si matinal, alors je m’assois avec les deux autres lèves-tôts, une Australienne et un Marocain-Italien, et on jase de sujets de backpackeurs ordinaires. Ça faisait quand même longtemps que j’étais hors de la track battue, et ils s’avèrent de bonne compagnie. Puis le boss de l’auberge nous demande si on veut des sandwiches falafels, qu’il commande par téléphone en leur langue bizarre et abrasive. Il faut que l’un de nous aille les chercher, je me porte volontaire, mais non, c’est le gars au phénotype marocain qui se fait donner la mission, vu que le prix sera pas le même si c’est moi ou l’australoïde qui se pointe là. Ah, Jordanie.

Pour le reste de la journée, je calisse pas mal rien. J’avais prévu arriver plus tard anyway, et bien que l’idée d’aller prendre une marche est là, mes muscles de jambes tout mâchouillés des longues marches de la veille et le prospect d’avoir à marcher toute la journée le lendemain me disent que ce serait sage de me reposer, et en plus en après-midi il se met à pleuvoir. Alors je passe du temps sur mon ordinateur, assis à une table au cinquième étage, à admirer la vue et boire des litres et des litres de thé.

Le soir, je me rends à un resto voisin, à la recommendation du gars de l’auberge, et je commande un de leurs mets nationaux, le mansuf. C’est un gros morceau de mouton servi sur du riz avec des noix de pin, le mouton a une odeur et un goût un peu, ahem, “chien mouillé” auquel il faut s’habituer, et la sauce au yogourt qui vient à côté a un parfum encore plus fort, mais moi il s’adonne que j’aime bien ça, ça me rappelle certaines cuisines de l’ouest de la Chine. Bien gavé, je me couche tôt et je dors merveilleusement dans la pièce pas chauffée, sous une épaisse couverture de laine.

Le site de Petra ouvre à 6, et il est pas longtemps passé cette heure matinale quand je passe le portail. On m’avait conseillé d’y aller le plus tôt possible pour éviter les hordes, la plupart venant en day trip de Amman, Aqaba ou même Israël. Je suis donc pas mal tout seul sur le long sentier qui serpente dans une dramatique gorge qui mène à la ville secrète, l’ancienne capitale des Nabatéens. Je broute mon déjeuner, un croissant et des fruits et une barre de chocolat, sur un banc en roche devant la Trésorerie, le plus gros et le plus célèbre de ces buildings taillés dans la roche. C’est quand même impressionnant.

Le sentier continue, dans une vallée puis dans une plaine ouverte avec des colonnades et des ruines et des trous dans la montagne qui servaient autrefois de maisons, d’entrepôts ou d’étables. Puis ça commence à monter, mon dépliant dit que cette section est catégorisée comme “hard” mais je pense pas que ça score dans le top 50 des grimpées les plus rigoureuses que j’aie faites dans ma vie. Il faut juste monter, pas s’arrêter, et pas être une grosse teupette. Le niveau de difficulté est peut-être pas dans le nombre de marches (900 environ si j’ai bin compris) mais d’éviter les fatiguants avec leurs stands à souvenirs, moi en tout cas j’ai des écouteurs et des lunettes fumées et à aucun moment je reconnais leur présence, même quand une bonne femme me crie après pour avoir osé passer devant sa table de cossins sans en acheter un ou même regarder. Elle a dû crier fort, la capuche, pour que je l’entende même avec l’album de death metal qui jouait au volume maximum.

J’arrive au monastère, une encore plus impressionnante construction que la Trésorerie à mon avis, surtout à cause de son emplacement dans un paysage de montagnes qui s’étendent à l’infini. Il fait mauditement frette, avec le vent, alors après avoir mangé une autre collation je redescends. Je croise de plus en plus de groupes, incluant des troupeaux de parfois 50 boomers, avec un guide qui leur parle en allemand, italien, espagnol et sûrement plein d’autres langues européennes. À quasiment 100 piasses par personne, plus tout le upselling, le gouvernement jordanien doit faire la piasse en simonaque avec ce site, avec très peu d’overhead, juste un site archéologique qu’un autre peuple que le leur a bâti il y a plus de 2000 ans. Je me demandais au début si ça vaudrait la peine, si je pourrais juste aller à des sites de plus petite envergure mais moins de trouble comme je me suis trouvé à faire avec le Machu Picchu pis le Angkor Wat, mais ils ont bien orchestré ça les estis, avec leur Jordan Pass qui lève tes frais de visa et te donne accès à un paquet d’autres sites et fait en quelque sorte que tu serais cave de pas aller à Petra.

Moi en tout cas je suis heureux, c’est indéniablement magnifique, et je profite de la belle journée, surtout qu’ils annonçaient possiblement de la pluie. J’emprunte le sentier vers l’autel des sacrifices (ce qui fait qu’une de mes tounes préférées de Slayer se met à jouer dans ma tête), une autre longue grimpée jusqu’à temps que j’aie une vue qui surplombe tout le site en bas. Une fois redescendu, il est à peine 13h, ce qui veut dire que j’ai quand même marché un six heures quasi d’affilée, incluant des montagnes. J’ai pas mal fini, oui il reste un ou deux sentiers périphériques, mais je comprends pas trop le monde qui disent que tu as besoin de plus qu’une journée pour Petra. Ils se promènent avec des marchettes, coudon?

Je m’assis sur une roche et regarde longuement les alentours, avant de retourner. Quand j’étais passé devant la Trésorerie, avant 7h, il y avait juste moi et quelques Japonais, là il y a des centaines de personnes essayant de se prendre en selfie, et même des chameaux. Je continue, et j’arrive à mon auberge en milieu d’après-midi. Le reste de ma journée est pas mal oisif, surtout qu’il tombe un orage un peu après mon arrivée. J’espère que les troupeaux de boomers encore sur le site se sont habillés en conséquence.

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