De mon chalet sur le bord d’un lac, je me rends à l’arrêt de bus de bord d’autoroute et j’arrive à Helsinki 5 heures plus tard, où je transfère dans le train pour Hyvinkää. À voir la quantité de gilets de Burzum, de cheveux longs et de battle vests, je sais que je suis sur le bon chemin, et le 45 minutes sur les rails passe vite à jaser avec les amis à usage unique de mon compartiment, un couple australo-américain et un Torontois, aussi maniaques de black metal que moi.
Pour dormir, il y a plusieurs options: une chambre d’hôtel ($$$ et dur à trouver à moins de s’y prendre tôt), retourner à Helsinki avec l’excellent réseau de trains finlandais qui sont presque 24/7 (ce qui sonne pas le fun du tout), un camping désigné (besoin de ton propre équipement), ou une salle de l’école, où tu peux crécher pour 23 euros la nuit, prospect intéressant pour les broke dead dicks qui veulent étirer leur argent à la fin d’une année de voyage quasi-nonstop et/ou boire plus de bière.

Le Torontois, un grand gaillard prénommé Adam, se dirige aussi vers là, on y va ensemble et on check in. Déjà, mauvaise surprise, ils disaient d’emmener son propre sleeping bag mais rien au sujet des matelas, je pensais ils auraient des matelas de gym ou de quoi du genre, mais non, un plancher dur s’offre à moi. Un Hongrois débarque avec plein d’équipement de glamping et un gigantesque matelas gonflable et me dit qu’il a un autre matelas dans son char, mais qu’il perd son air. Il me l’offre, et même si il se dégonfle aussitôt, au moins j’aurai de quoi qui me sépare du plancher froid. Nuits confortables en perspective…
JOUR 1 – BE TRVE
L’arrivée au site et la réception de bracelets se fait assez vite, reste que je manque le tout premier band et j’arrive tout juste quand DEATHCHAIN commence. Ils sont un des ambassadeurs des styles hors du black metal qui fait la majorité de l’affiche de ce fest, et jouent un deaththrash bien carré et organique comme les os d’animaux qui adornent le pied de micro. Plus d’un des membres porte un coat de cuir en bédaine en dessous (reject modernity, embrace tradition) et leur track Metal Legion fait mouche. Leur set dure 45 minutes, ce qui est un peu long considérant la linéarité de leur style et la grosse journée devant nous, mais le fest est organisé pour qu’il y ait zéro temps mort, dès qu’ils finissent sur la scène extérieure il y a un groupe qui commence à l’intérieur. Il s’agit de AEGRUS, dans un style de black metal bien finlandais, à la fois mélodique et méchant. Leur deuxième toune (dont j’ai manqué le titre) est bien catchy, et ils offrent une variété rhythmique pas pire du tout.
CRAFT est un des bands les plus attendus de la première journée si on se fie au street talk, et j’écoute leur album au titre charmant de Fuck the Universe depuis un petit bout. Le frontman est un vieux avec une camisole de W.A.S.P. et avec ses musiciens cagoulés, ils ont une approche psychédélique, malsaine, quasiment prog au black thrash. C’est evil mais des bouts sont quasiment festifs et je vois des festivaliers faire des petites danses sur les beats moins orthodoxes. Je savais pas trop à quoi m’attendre d’un fest dédié au black metal, si les gens étaient pour être trop sérieux ou de quoi du genre, mais non, c’est pas mal la même chose que tu verrais ailleurs, des pouels qui sont là pour boire de la bière et avoir du fun.

COMMANDER AGARES est le groupe du fondateur et organisateur du fest, un chauve avec des gants d’armure de chevalier qui se balade sur le stage avec un os de fémur dans une main et un cossin d’encens au bout d’une chaîne dans l’autre. Ils sont deux vocalistes, mais ils ont des voix quasi identiques alors je vois pas trop le point. Leur backing band joue du black finlandais lent et mélancolique, avec un décor sur l’écran arrière qui évoque mi-science-fiction, mi-occulte. Puis c’est HELLBUTCHER, projet du maître à penser derrière Nifelheim, du vieux heavy metal/black première vague bien evil. Je savais qu’au moins un des musiciens aurait un coat de cuir en bédaine en dessous, et je gagne doublement mon pari. Le Boucher de l’Enfer, lui, est froqué d’un espèce de costume de gimp sado-maso plein de pics et studs. Il y a pas mal plus de présence scénique qu’avec les bands de trve black, et ils terminent ça avec deux covers de Bathory et Venom.

Je vais aux kiosques de bouffe, et outre des burgers et du poulet rôti qui ont l’air pas pires du tout, il y a des places qui servent du stock typiquement local, et je prends une assiette de boulettes de renne avec frites, légumes et salade de choux. Très nice.
Ensuite c’est ANTIMATERIA, dans une veine plus atmo avec nappes de clavier, mais quand même pas mal de dynamisme. Ça sonne comme une tonne de briques, à date les bands qui jouent dedans ont une meilleure qualité sonore que dehors, ce qui est comprenable. Meilleur show à date pour moi, mais il reste pas mal de groupes qui ont le potentiel de les battre.
…comme AETERNUS (Atchou!), qui s’envole avec ce titre après juste une toune. Jésus crisse, d’où sortent-ils?! Metal-Archives disent qu’ils sont norvégiens et qu’ils jouaient du black avant de virer au death vers l’an 2000, et ouin on a droit aux deux styles en alternance ou en métissage. C’est tight, avec un vocal caverneux monstrueux et des riffs dissonants à la Deathspell Omega qui font leur apparition de temps en temps. Wow, je vais plonger dans la marmite d’Aeternus moi là.

Pour commémorer leur trentième anniversaire, HORNA fait trois sets en autant de jours de festival, avec un vocaliste différent à chaque fois. Là c’est Nazgul qui commence, et le groupe nous rentre dedans, avec un mur de son et des cris de Lucifer. Absolument malade prestation des GOATs du black metal finlandais. Il y a aussi un autre chanteur qui se pointe au milieu du set, un chauve au cri strident qui fait contraste aux cheveux gras de Nazgul et ses vocaux gutturaux, et il emmène le taux de calvitie totale à 4 membres sur 5 le temps qu’il pousse sa ritournelle.
Parlant de chauves, adressons tout de suite l’éléphant dans la pièce: est-ce qu’il y a des gens avec des t-shirts louches codés ou très explicites au Steelfest? Oui. Est-ce que c’est un festival NSBM/extrême-droite/nazi pour autant? Non. Comme j’ai dit, la grande majorité de la foule sont des trippeux de metal ordinaires avec un penchant évident vers le black, et même si on aperçoit des nazillons en herbe dans la crowd, on croise aussi des gens au phénotype aztèque, inca, chinois, sud-indien et même un Africain ou deux, et ils marchent pas en rasant les murs, ils sont autant les bienvenus que quiconque. Les nazis aiment le black metal, qu’est-ce que vous voulez je vous dise? Chus sûr ils aiment aussi les tartelettes aux framboises, et je vais pas m’empêcher d’en manger une pour autant. La question est donc peut-être sur la culpabilité par association, le fait d’être dans le même endroit où des gens aux positions extrémistes ou peu savoureuses s’affichent, et si tu es déjà allé à une St-Jean-Baptiste à Québec, bin j’ai des petites nouvelles pour toé mon chum. Être en présence de nazis en fera pas un de moi ou me fera pas les trouver insignifiants dans plusieurs sens du terme, et si le fest est notoire (comme le mouvement black metal dans son ensemble en général) pour ni condamner ni promouvoir aucune idéologie politique, bin c’est de liberté d’expression on parle rendus là, y a des places dans le monde où tu peux aller si tu aimes pas ce concept. Aucun des groupes durant les trois jours a fait des Avé Césars ou affiché des croix gammées, ce qui serait une autre paire de manches je l’admets, et j’ai vu aucune bataille ou engueulade dans cet endroit convivial dédié à l’adoration d’un des styles de musique les plus extrêmes et poussés qu’il soit. Il y a des groupes et fans qui boycottent le fest, et c’est leur droit, tout comme il y a des gens qui veulent pas aller au Obscene Extreme à cause des groupes de grindcore ou punk croûteux qui déblatèrent leur support pour des opinions politiques de merde comme le communisme et l’abnégation ethnomasochiste, et c’est cool aussi. Chus là pour la musique et le social.
Alors revenons à nos moutons, donc. Je suis à la clôture pour le co-headliner de la soirée, UNLEASHED, qui démarre ça avec une pièce qui sonne exactement comme Before the Creation of Time, mais qui est pas Before the Creation of Time. C’est un peu un problème avec Unleashed, pas mal de leurs tounes se ressemblent, mais ils savent aussi alterner de tempo, nous faisant chanter et headbanger sur The Longships are Coming avant de peser sur le gaz pour No Sign of Life. Ils reviennent dans le mid-tempo, l’enthousiaste Jon Lundqvist annonçant “The next song is about an important tradition…” et moi qui crie “Midvinterblot!”, qui me vaut un sourire et un “This guy knows his shit!” avant qu’ils commencent la toune. Jésus, un tel groove devrait être illégal. Into Glory Ride et Death Metal Victory sont de parfaites démonstations de pourquoi Unleashed et leurs comparses du Big Four du death metal de Stockholm sont encore si influents trente-cinq ans plus tard, et ils terminent ça avec un Before the Creation of Time qui me fait headbanger comme un poulet. Unleashed est pas mon groupe favori sur album, mais en show, ça a fait la job en crisse, bin content de finalement les voir.

Je croise mon voisin hongrois qui m’a prêté un matelas, il est saoul mort, me fait un hug viril, et a bien hâte de voir GORGOROTH. On assiste au show ensemble, j’ai peu suivi ces zigotos depuis un bout, je sais qu’ils ont eu un schisme quelconque, avec poursuites judiciaires sur qui a le droit d’utiliser le nom et ce genre de niaiseries, et il s’adonne que c’est Infernus qui a reçu l’injonction de la cour et a rebâti le groupe. Je les avais vus au Wacken en 2008, avec Gaahl, je me rappelle que tout le monde faisait des jokes à son sujet, peu après la sortie du documentaire A Headbanger’s Journey: une blague commune était d’aborder un inconnu et demander “Hey, what does black metal mean to you?”, et si il prenait quelques secondes à regarder devant lui et prendre une gorgée de vin invisible (ou de bière allemande chaude) et répondre “Satan!” tout le monde l’abreuvait de high-fives de saoulons, sinon on le huait et le traitait de poseur. Hé bien, après une performance ultraviolente à 2 heures du matin, avec un Gaahl des plus intimidants et une rangée de filles tout nues crucifiées derrière lui, pus personne se moquait de lui. Gorgoroth c’est du sérieux. Là, seize ans plus tard, on a un décor plus modeste et un autre chanteur, un chauve qui arpente la scène comme un animal enragé et qui lâche des calls dramatiques en growls puissants alternés de voix claire comme Nattefrost. Le son est un peu mauvais, mais on entend quand même le riffing syncopé norvégien classique, et on trippe bien sur l’enchaînement de Destroyer et Krig. J’aurais bien pris Carving the Giant aussi, une des rares tounes qui me foutent la chienne pour de vrai.
Le Hongrois m’invite pour une bière, et on arrive au pub moins d’une minute avant qu’ils arrêtent de servir. On boit nos pintes sur le patio en jasant, il est comme moi très cultivé et enseignant de profession, et en plus il habite en Finlande depuis quatorze ans, donc il possède à la fois une connaissance exhaustive du pays et un sens de la perspective et de distance qui font que c’est très intéressant de l’écouter. Mais un moment donné le sujet de la Russie est mis de l’avant, et oh boy, étant de deux pays qui ont une grosse dent contre leur gros méchant voisin à l’est, sa haine viscérale vient de deux fronts. Certaines blessures sont fraîches ou encore grandes ouvertes, et des fois je me dis on est assez chanceux au Québec, nos ennemis étant les Britcunts (qui sont devenus nos alliés depuis), les Canadiens anglais (avec qui l’hostilité se limite pas mal aux têtes carrées qui chient de la marde par la yeule ou par leur clavier sur des sections de commentaires du Globe and Mail ou Toronto Post) et les Iroquois (qui sont peu nombreux et font pas trop de trouble à part vendre des cigarettes de contrebande et des fois bloquer un pont). Chus né en 1985, pas en 1670, 1820 ou 1915, faque à moins d’avoir un sens de la rancune intergénérationelle, je suis pas mal épargné des courants de haine vitriolique qui animent malheureusement pas mal de populations où je voyage et parle aux gens.
JOUR 2 – BE GRIM
J’ai pas super bien dormi, avec le froid environnant, les ronflements de mes voisins et surtout la surface dure, mais une douche me remet sur pieds un peu. Le Hongrois me propose d’aller prendre une bière.
“Il est même pas 11 heures du matin! Et j’ai l’impression de m’être fait rouler dessus par un char. Il faut que je garde mes forces, on a une longue journée devant nous”
“Bah, viens t’asseoir et discuter, pas obligé de boire”
“Mais si je te regarde boire de la bière, ça me donnera le goût”
“Juste une”
Quatre pintes plus tard, je vais acheter de la bouffe au supermarché et je grignote ça vite fait avant d’entrer sur le site du festival. CADAVERIC INCUBATOR est là, un power trio qui oeuvre dans le deathgrind guttural devant un parterre encore assez clairsemé. C’est le genre de band on s’attendrait à voir au Obscene plus qu’au Steelfest, mais j’approuve, la variété c’est bien. Puis on revient à nos moutons (noirs) avec CHAMBER OF UNLIGHT, qui semble assez attendu mais fait peu d’impression sur moi, la barre ayant été mise haute en crisse hier. J’aime leur son de basse qui fait clang-clang, une rareté dans le black metal.
En faisant mes devoirs en préparation pour le festival, j’ai écouté un album de toutes les formations à l’affiche dans les semaines précédentes, et celui d’ERESHKIGAL était aux limites de l’écoutable, avec une production qui sonnait la grosse raie, même avec les standards d’un style où sonner la raie est souvent vu comme positif. En live, c’est bien mieux. Le quintuor représentant le Mexique a emmené tous les Espagnols et Latinos au devant de la scène, et on a droit à du heckling du genre “Viva Mexico!”, “Cabrones!” et “Puta madre!” même si ils restent dans leurs personnages tout cloutés et corpsepaintés et stoïques, ce qui est d’ailleurs un peu drôle à voir quand il est 15h avec un gros soleil de plomb. Le gros chanteur se paie même quelques falsettos sur la dernière pièce.

Retour dans la salle sombre pour les Tchèques d’INFERNO et leur approche très caverneuse au black, un peu comme ce que Dead Congregation et toute cette vague fait avec le death metal. Ils ont deux guitares mais pas de basse, reste qu’ils produisent un mur de son hypnotisant. Le set finit avec le chanteur couché à terre à hurler sa vie, et quand on sort, on se fait accueillir par les gros riffs crasseux et doomy de CORPSESSED, le représentant de ce style de OSDM bien ancré dans la tradition finlandaise des années 90. J’avais bien hâte de les voir (et de faire chier mes potes très death metal qui ont jamais eu la chance!) et c’est bien, mais je suis un peu dans un slump de mi-festival alors j’essaie tant bien que mal de garder les yeux ouverts.

STRID est classifié comme DSBM, reste que pour moi c’est plus du atmosphérique, une musique qui serait quasiment jolie si c’était pas des vocaux aigus harsh. Après une track, je découvre un banc et je m’allonge pour une sieste. Normalement, dire qu’un groupe t’a endormi serait une insulte, mais je mets souvent de ce genre de black metal pour m’endormir et ils tombaient à point, et ce que mon conscient a entendu avant que mon subconscient prenne le relais était très bien, avec un son béton.
Je me réveille dans une salle vide, et dehors il y a foule pour DÉLÉTÈRE, qui nous arrive drette de Québec! J’aime beaucoup leur dernier album Songes d’une Nuit Souillée, et ils nous balancent une succession de pièces de black mélodique avec une drive insatiable. À voir le nombre de t-shirts de Forteresse sur le site, les Européens qui connaissent leur shit savent que le Métal Noir Québécois c’est pas des blagues, et Délétère en est un excellent représentant, prolifique et actif à l’heure où certains vieux de la vieille ont mis leurs projets sur la glace. Le vocaliste Thorleïf (avec son coat de cuir en bédaine en dessous, bien sûr) a de l’énergie à revendre et semble vouloir décrisser tout à coups de pied de micro, mais sa carapace trve grim s’effrite une ou deux fois alors qu’il présente les tounes et essaie de pas pouffer de rire en disant de quoi du genre “The next song is about incest and very violent sex!” avec son bel accent de la Capitale Nationale.

BATYUSHKA donne tout un show, une genre de messe noire tout encapuchonnée, avec un gars aux vocaux typiques et deux qui font des chants grégoriens orthodoxes, avec un décor élaboré et des chandelles partout. C’est un autre groupe qui a eu une méga-chicane, et à ce jour deux incarnations existent. Je pense que celle que j’ai vu à Montréal l’an dernier est l’autre, mais en tout cas j’aime leur swag, et les deux ont donné un show qui vaut également le déplacement.
VED BUENS ENDE est un vieux groupe des années 90 sorti des boules à mites pour un show de réunion, jouant un mélange de prog et de black, avec un vocaliste au chant clair qui fausse par exprès comme le bonhomme qui appelle à la prière dans les pays musulmans. Pas trop mon bag, je regarde une toune ou deux avant de me faire inviter backstage pour passer Délétère et Ifernach en entrevue pour mon ami et partenaire, le webzine Crypt of Dr Gore. Des entretiens super intéressants avec des musiciens très passionnés, vous irez lire la prochaine édition de la Crypte si ça vous intéresse.
Puis c’est le tour de MISTHYRMING, un des groupes qui a fait le plus de vagues dans la scène black metal des dernières années, mettant la scène islandaise sur la map, et ils méritent chaque atome du hype dont ils bénéficient, chaque album qu’ils sortent étant magnifiquement reçu. Et sacrament! Quelle performance! Certains groupes black mettent plus l’emphase sur l’atmosphère ou alors sur les riffs, Misthyrming excelle dans les deux, et leur show est d’une intensité plus souvent vue dans les concerts de grindcore que de black. Côté visuel, au lieu du corpsepaint traditionnel, ils sont couverts d’une genre d’huile, et headbangent comme des déchaînés tout le long. Ils terminent ça en descendant la barrière pour se mêler aux premières rangées.
INFERNAL WAR vient ensuite, un genre de blackened death mitraillette. Ils sont un peu underwhelming après Misthyrming (heille ça rime) alors j’en profite pour aller m’alimenter et me faufiler à la clôture pour HORNA, cette fois avec Corvus, qui a été leur frontman de 2002 à 2009. Encore une excellente prestation de black finlandais, un tantinet plus mélodique que la veille. Je suis vraiment horny pour Horna.

Les Ukrainiens de KRODA nous livrent un show de black atmo teinté de nappes de clavier, style “forêt enneigée”, de quoi que je pensais entendre un peu plus au Steelfest. Intense, épique, envoûtant. Puis les headliners de INQUISITION! Je suis surpris de voir que Dagon est tout seul, avec un drummeur qui gigote sur son banc à force de blaster, je pensais qu’il aurait des musiciens session avec lui. Mais non, il fait ça sans basse ou rhythm guitar, et le son est énorme pareil. Sur album je le trouve inconsistant, mais ses meilleurs, comme Black Mass for a Mass Grave, sont des chefs d’oeuvre absolus. Bon, c’est sûr que le son est pareil comme Immortal (riffing, structures, ambiances, vocal de crapaud, hell même son maquillage de panda est identique à celui de Abbath) au point que tu te demandes où l’influence se termine et où le plagiat commence, comme avec Lampe of Murmuur, mais Inquistion tire quand même son épingle du jeu en jouant des sacrament de bonnes tounes. C’est ça le plus important, non?
JOUR 3 – BE NECRO
Poussé par Adam le Torontois, je goûte finalement au lonkero, le breuvage en canne que les Finlandais affectionnent autant. C’est pas bin plus que du gin et jus de pamplemousse, ce que je bois souvent chez moi les dimanches de lendemain de brosse, et c’est délicieux. On se claque quelques cannettes en bouffant notre dîner acheté au supermarché, avant de rentrer pour le set de LICHE DES ORTEILS eeeuuuhhh je veux dire LICHT DES URTEILS, un jeune groupe de Tampere qui fait un black metal bien punky et crotté.
Puis c’est TORSOFUCK, que j’ai déjà vu en 2008 au Maryland Deathfest! J’avais aucune idée ils existaient encore, et je trouve très comique qu’ils se soient glissés sur ce lineup, puisque vous aurez sans doute deviné que c’est pas du black metal. Grosse surprise, le vocaliste à la carrure d’Hugo Girard (et à la face d’Hugo Girard aussi, à y penser) tient maintenant une guitare, et même si en 2008 il avait un backing band complet, cette fois il a juste un drum machine un peu cacanne, et l’aide d’un autre vocaliste. Il doit y avoir pas mal de trve blackeux qui ont rien à cirer de ce genre de goregrind ultra-brutal complètement jambon, mais il y a pas mal de monde malgré le placement en début de journée à scander leur nom (c’est si le fun chanter “Torsofuck! Torsofuck! Torsofuck!”, surtout avec un accent finlandais) et danser sur leurs belles ritournelles. Dû à mon âge avancé, je mosh juste une fois par année en moyenne, si la tentation est irrésistible, et quand un beau pit en rond s’anime pour leur grand succès Raped by Elephants, je peux pas m’empêcher et je danse comme un cornet sur pattes.

On revient dans le charmant monde du black metal avec MARRAS, un autre produit de cette scène finlandaise si productive, et c’est nice et épique. Je regarde le bar et me pose la question existentielle, devrais-je maintenir mon buzz ou le laisser se dissiper? Mes pauvres nuits de sommeil et le haut coût des cannes de bière me font décider la seconde option, alors je vais remplir ma bouteille d’eau au lieu.
THORNSPAWN arrive ensuite, des USA, avec un drummer qui chante et l’épeurante bassiste qui avait dépanné Délétère la veille, dont quelques membres avaient dû rester à Québec. Leur set est intense et joué avec brio, nous rappelant que quand c’est bon, du black metal, c’est bon en crisse.

Le Gaspésien excentrique et reclus d’IFERNACH fait rarement des shows mais sort album par-dessus album, lui donnant un following culte, et donc il y a foule pour son set. Mais malgré son inactivité sur les planches, et les musiciens mercenaires qui l’accompagnent, holy fuck que ça semble être bien rodé son affaire. C’est fort à s’en percer les tympans, avec la pédale au fond tout le long, à part pour la dernière pièce, Coupe la Tête et Bois le Sang, affublée d’un beat de clown mais aucun esprit à rire. Une sacrament de track qui me rappelle Malveillance et les groupes de black-crust du genre, je la connaissais pas et il va falloir que je fouille dans son énorme catalogue pour la trouver.
Je jase un peu avec un compatriote chinois, qui est gros fan d’Ifernach mais un peu déçu qu’il ait surtout joué du trve black et pas assez de stock infusé de punk à part la dernière. Et en regardant les Allemands de SAKRISTA, je me dis que c’est en effet un peu un problème avec le fest en général, autant que j’adore le black metal, je suis rendu un peu saturé et j’aurais pris un peu de variété, et je parle pas juste des groupes de death ou adjacents au grind, mais de la variété dans le black. Je sens que j’aurais bien plus aimé Sakrista dans un bar sombre sur une petite affiche, alors que là, même si tout à propos de leur set est de haut niveau, je finis pas trouver ça un peu générique. Je croise le chanteur de Torsofuck et on discute un peu, il est bien amusé que j’aie déjà vu son band seize ans auparavant.
DIOCLETIAN de Nouvelle-Zélande m’emmène la variété que je cherchais, avec un son raw et saturé, du genre de black extrême bien au-delà du rulebook de la deuxième vague, et ensuite c’est BARATHRUM, qui a surtout joué du black punky de haute énergie que le vieux doom sale de leurs premiers albums.
Ça me revigore un peu, et puis c’est le tour de WHITE DEATH, le band préféré de Cuckthony Bourdain. Ils ont le sens du spectacle, avec deux filles flambant nues attachées à des croix, et une grosse carcasse de mouton sur laquelle un colosse varge à coups de gros couteau de boucher, passant proche une couple de fois d’accrocher le chanteur, qui porte rien d’autre que des bottes et une ceinture de balles. C’est tellement ridiculement démoniaque, je me demande ce que mes ancêtres catholiques dévots penseraient de moi dans cette foule. Malgré tout ce visuel, au début le son est de la grosse schnoutte, avec juste un bass drum, les guitaristes et le chanteur s’époumonant en vain, avant que le soundman règle ça. Musicalement, c’est du symphonique, plus Obtained Enslavement que Dimmu Borgir, avec évidemment un gros côté malsain et succube. Ils auraient dû faire ce show dehors au lieu qu’en dedans, parce qu’avec tous les morceaux de mouton décalissé qu’ils ont lancé partout, la salle sent la crisse de charogne pour les heures à venir.

ACHERONTAS donne un show évidemment plus modeste, froqués en prêtres avec des colliers d’os. La scène black metal grecque regorge de sons très intéressants, il y a pas juste Rotting Christ, et Acherontas en est le représentant. Puis c’est DENIAL OF GOD, dont je me rappelle de rien, et j’ai à peine pris de notes. Je passe une partie du set assis aux tables dehors à boire de la bière avec des nouveaux chums, avant d’aller voir DODHEIMSGARD, groupe norvégien très weird, avec toutes sortes de cossins prog glissés dans leur black parfois très accrocheur. HORNA avec Spellgoth nous ressert une portion copieuse de black finlandais, je la mange toute et je liche même l’assiette, puis c’est BLASPHEMY, un des bands les plus attendus du week-end. En show c’est vraiment awesome, une alternance de blasts constants et de beats thrash martiaux bien fédérateurs, avec du chaos à revendre et des solos tout garrochés. Pourquoi y avait-il juste un groupe de war metal sur l’affiche?!

Il y a plein de cannettes qui traînent partout, ce qui est de l’argent gratuit, vu que le bar donne 1 euro quand tu les ramènes. J’en ramasse un paquet, et avec quelques voyages, je me fais une trentaine d’euros en juste quelques minutes de travail. Pas pire, pas pire.
Je retourne en dedans, et je vois que la scène est tout nue, pas de drum kit. Je demande à un badaud si le show est fini, et il dit que non, il reste bel et bien un band, juste que c’est de l’industriel et donc ils ont pas besoin de batterie. Hmmm? Après une intro interminable, les trois guitaristes de MYSTICUM arrivent, et sur des gros beats joués par une machine, leur set commence. C’est assourdissant, et je sais pas si j’ai déjà entendu de quoi de tel, on dirait de la musique de rave déviant avec du monde en cuir qui se fouette dans un sous-sol à Berlin, avec un côté sombre et froid évident apporté par les guitares électriques, les vocaux black et l’esthétique sur l’écran en arrière d’eux. J’ai une face en point d’interrogation, à me demander si j’aime ou j’aime pas, et à regarder comment le monde autour de moi gueule en coeur, semble-t-il que ce genre de mix black et indus a des fans. En tout cas, moi qui se plaignait qu’on manquait un peu de variété, là on en a.

Faque ouin, excellent travail, Steelfest. Je sais pas si j’y retournerai de sitôt, vu que j’ai rarement du temps libre en mai et que la Finlande c’est loin, mais j’ai bien apprécié mon expérience.

Leave a comment