L’Himalaya au temps du Covid

Je pensais le mettre en deux ou trois parties, mais vu que je l’ai écrit d’une shot (dans l’avion en revenant, avec l’ordinateur de ma copine qui avait pas d’accents français, je l’ai donc relu et fait les corrections et additions nécessaires en arrivant à maison) tant qu’à faire je vais le publier en un gros pavé de 4000 mots. Le voilà:

À cause de vous-savez-quoi, ma douce et moi on a évidemment dû annuler notre voyage d’été en Afrique, alors on se console avec un petit périple domestique vers le sud-ouest de la Chine. À l’aéroport de Lijiang, il faut scanner un code QR qui ouvre une application du gouvernement provincial, et remplir un petit questionnaire. Es-tu sorti de la Chine et/ou allé à Dalian ou Wulumuqi durant les 14 derniers jours? As-tu des symptômes de grippe? Si la réponse est non aux deux, boom tu reçois un code vert, que tu te fais demander des fois quand tu vas à des endroits bondés. Je me demande des fois, c’est quoi tu fais si t’as pas de smartphone?! J’imagine un futur pas si lointain où ce sera carrément obligatoire, pour ton bien, bien sûr. War is Peace, Freedom is Slavery and Ignorance is Strength.

Anyway avec tout ça on arrive à 3 heures du matin à notre hôtel, et avec les morons qui font du bruit dans la chambre d’à côté (ce qui sera une constante au cours de ce voyage, tsé on est en Chine) on se tape une grasse matinée et on commence plutôt tard notre première journée dans cette ville. Les petites ruelles qui avaient semblé sinistres au milieu de la nuit sont bien plus photogéniques le jour venu, et outre les plus grosses, qui sont épaule-à-épaule, elles sont moins delugées de touristes que d’habitude, Covid aidant. C’est sûr qu’il y a pas mal de choses négatives qui peuvent être dites sur ce genre de “vieilles villes” où litéralement 100% des buildings sont là pour touristes, que ce soit des hôtels de différentes gammes, restaurants, magasins de babioles, agences de voyages, avec exactement zéro résidences privées ou, je sais pas moi, de quincailleries ou de places qui réparent des laveuses ou d’écoles ou n’importe quoi qui prouve que des gens habitent là, mais Lijiang est plutôt charmante et y a de quoi de pire que de tuer un après-midi à se balader de petite rue en petite rue dans un tel décor.

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Je parle de la vieille ville ici bin sûr, parce que le reste de Lijiang, comme on le constate du belvédère sur la colline, est pas trop différent de ces milliers de bleds provinciaux poussiéreux, drabes et insignifiants, à part les montagnes au loin et une plus grande proportion de Tibétains. J’avais visité ces gens dans le sud du Qinghai et l’ouest du Sichuan en 2009 et je dois avouer que je les avais pas trouvés super agréables en general, on verra si leurs cousins de l’est du Grand Tibet (qui a été annexé par la Chine y a pas si longtemps, dans les années 1600) sont aussi prompts à me quêter de l’argent ou me regarder de travers pour oser exister dans leur periphérie. Déjà je remarque qu’ils parlent chinois mandarin, alors que dans le nord un méchant paquet en étaient incapables ou le parlaient plus mal que le moi de cette époque, qui avait moins d’un an au pays sous la ceinture.

En début de soirée, on se rend au parking souterrain en periphérie de la vieille ville (qui est exclusivement piétonnière), où les parents de Zhuzhu viennent d’arriver avec leur char loué. Hé oui, ce sera un voyage familial, ça promet. Pour ce qui est des beaux-parents, dans les couples si communs “dude blanc, fille chinoise”, les histoires d’horreur sont plus la norme que l’exception, et j’ai entendu toutes les pires, des remarques racistes ouvertes constantes aux conflits d’argent en passant par les comportements quasi-animaux excusés comme etant des “différences culturelles”, des demandes complètement irraisonables aux désaccords pour ce qui est de comment élever les enfants/petits-enfants, quand c’est pas carrément des tentatives de sabotage de couple pour que Xiaoxiao en vienne à ses sens et finisse par crisser le yangguizi là et juste marier le gars un peu autiste mais qui gagne 9000 RMB par mois à sa job à la Agricultural Bank of China, dont l’oncle est vice-assistant député des transports pour le comté de Nongzhou, et qui va lui faire pondre un bébé racialement pur (préférablement un garçon). Je suis donc très content de la relation que j’ai avec mes beaux-parents, qui  sont pas des paysans illettrés xénophobes et qui m’aiment bien (et c’est réciproque). Depuis quelques années, ils sont en genre de semi-retraite et s’adonnent au vagabondage, ayant déjà visité quasiment chaque esti de recoin de la Chine et pas mal de pays voisins, et là c’est le premier voyage qu’on fait toute la gang ensemble, autre que quelques petites escapades d’un jour ou d’un weekend quand on est dans leur coin ou eux dans le nôtre.

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On va déposer les bagages à l’hôtel, qui est plutot cute, tout en boiseries avec une cour intérieure et un canal rempli de poissons rouges qu’il faut enjamber pour arriver a l’îlot central, avec des chaises, parasols et une magnifique pièce d’ébénisterie qui sert de table à thé. On est dans le tea country, dominé surtout par le pu-er et le dianhong. J’accepte plusieurs tasses offertes par le boss, mais à cette heure précédant le souper, je suis pas mal plus interéssé par les cannes de bière de micro que j’ai achetées à Shanghai et mises dans le fridge de l’hôtel.

Notre souper est dans un resto plutot animé, où on se tape un gros festin avec les specialités locales: de la viande de yak, des champignons, et des plantes de montagnes amères. Le tout arrive cru à notre table, et on le met soit dans le chaudron de soupe qui bouille ou sur la plaque chaude. Pour la bière, tu as le choix entre la Dali, une lager cheap classique chinoise (pas qu’y a rien de wrong avec ça, surtout quand tu manges un gros repas huileux et salé et qu’elle est bien frette) et la panoplie de la brasserie locale Shangrila, qui s’avèrent délicieuses. Je goûterai à toutes les six (pas ce soir-là, donnez-moi un jour ou deux sti), et j’aimerais bin qu’elles soient disponibles dans mon coin du pays à 2000 km de là, surtout leur pale ale et leur double bock au blé, qui en plus d’être délectable, tape fort à 8.2%, une rareté dans le monde brassicole du Pays du Milieu.

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Les Tibétaines aiment se tresser des petites cordes de couleur dans les cheveux, et à l’instar des hennas et autres modifications corporelles temporaires observées ailleurs dans le monde, ce genre de choses est plutôt populaire avec les petites Chinoises en visite, et plusieurs petites filles offrent de te tresser ça a bas prix dans la vieille ville. Certaines sont ambitieuses et proposent même aux touristes masculins de leur faire des cornrows, j’aurai beau passer 120 ans en Chine mais je vois pas comment je pourrais arrêter de trouver ça hilarant de voir un Asiate avec une telle coupe de cheveux. On dirait qu’il se prend pour un rappeur.

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Le lendemain, on se lève tôt parce qu’on a mauditement de la route à faire. Monsieur Jin prend le volant pour la majorité, et Zhuzhu le relève pour des petits bouts. Je suis un peu nerveux et appréhensif quand ça arrive, pas parce qu’elle est chinoise, hihihi, ou parce que c’est une femme, hahaha, mais plutôt parce qu’elle est vraiment pas experimentée, et que plus qu’on se dirige vers le nord, plus que la route monte et devient accidentée, sans compter les vaches et les chèvres au milieu du chemin. Après 8-9 heures, on arrive a Felaisi, en periphérie de la ville lointaine de Deqin, et on passe la nuit là après avoir visité le temple bouddhiste du coin.

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Notre destination pour les trois prochains jours est le village de Yubeng, devenu assez populaire dans les cercles de hiking chinois dans les dernières années. On peut pas y aller en char, alors du parking on continue à pied, des fois sur une trail étroite, des fois sur la route de montagne boueuse où il faut se tasser des fois pour laisser un 4×4 monter avec les touristes qui prefèrent payer pour se faire charrier plutot que de grimper une calvince de montagne pis redescendre dans la vallée. Les beaux-parents choisissent cette option, ce qui nous permet de faire le hike avec juste un petit sac à dos. Finalement on arrive à Yubeng, qui est en fait composé de deux villages différents, Yubeng-d’en-bas étant a 200 m en contrebas dans la vallée comparé à Yubeng-d’en-haut, où on va rester.

Les deux jours suivants, on se tape les deux routes de randonnée, la première menant à un glacier et la seconde qui va jusqu’à une chute d’eau, dans un paysage montagneux parsemé de drapeaux de prière multicolores et d’animaux qui paissent (et chient). Elles sont pas super longues, 12-13 km aller-retour, mais les deux ont une différence d’élévation d’à peu près 1000 mètres alors ça remplit bien la journée avant de retourner au village se bourrer la face et boire de la bière. Pas grand chose d’autre à dire là-dessus que c’était magnifique, voici quelques photos:

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Quant à Yubeng même, son charme est encore plus ou moins intact, pour l’instant. Pas mal des maisons de ferme ont été transformées en hôtel ou restaurant, mais gardent leur aspect rustique original. Ce qui est un peu déplaisant est de voir les squelettes des buildings rectangulaires en train de se faire bâtir et d’entendre les bruits de scie à métal toute la journée, pour ce qui promet d’être des estis d’hôtels laittes. Ça me rappelle Mestia, en Géorgie, qui était pas mal juste un gros chantier de construction poussiéreux quand chus allé, mais je me dis que hey, ce genre d’overcommercialisation est inévitable, et qu’au moins je peux m’animer d’une certaine satisfaction hipsteure d’y être allé avant la plus grosse phase. Je me ressers un gros verre de whisky en regardant les sommets couverts de neige éternelle.

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Pour retourner, cette fois, on prend le Jeep, conduit par un Tibétain costaud aux cheveux tout depeignés, avec quelques tattoos grossiers sur ses avant-bras. Zhuzhu lui demande combien d’argent il fait par mois (ce qui est pas impoli pantoute ici), avec les six passagers qui paient 150 yuan chaque par trajet et les plusieurs aller-retours quotidiens, bin il s’avère que même si son boss prend la plus grosse partie, le dude gagne plus que moi mensuellement. C’est quand même bien que le tourisme, surtout le tourisme niché en région lointaine, puisse apporter tant d’argent à une région et à ses habitants. Et je dis ça sans mon sarcasme habituel, good for him, vraiment.

De retour au char loué, notre route nous emmène vers l’ouest, dans des paysages de vallée à couper le souffle mais aussi avec les conditions de route qui viennent avec. Les routes elles-même sont top notch, et je salue avec admiration les ingénieurs civils chinois et leurs crews qui ont étendu le réseau routier dans des terrains aussi impassables, mais avec les avalanches de roches constantes, la route devient souvent juste une voie. Et évidemment y a les esties de chèvres et vaches. Souvent faut je sorte du char pour les faire décalisser (y sont habitués aux vehicules et klaxons, mais fuient quand un gros Québécois barbu s’en va vers eux en faisant des gros mouvements de bras), pour tasser des grosses roches ou alors pour guider M. Jin dans les passages un peu plus difficiles. Notre progrès est lent mais constant.

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La petite ville où on va baser notre exploration de la region se nomme Bingzhongluo, et la voir apparaître à flanc de montagne nous fait sortir des “Ouh!” et “Aah!” et des “Finalement sti”, mais une fois arrivés sur sa rue principale, c’est un des bleds les plus laids et sales que j’ai vus depuis un maudit bout. C’est quand même une étape sur la route des touristes domestiques intrépides et le Grand Tibet, comme on peut voir avec toutes les plaques de char d’autres provinces, et les hôtels qu’on check sont pleins.

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On se rabat sur une dompe totale, qui sent le moisi, avec une douche qui marche pas (je me fucking lave en me vidant su’a tête des verres d’eau jaunâtre du robinet), un plancher concave qui accumule une grosse flaque d’eau pestilentielle, et des draps qui me donnent mes premiers bed bugs de ma vie. Comble de malheur, juste en bas de nos fenêtres, des fermiers jasent en crient et rient bin passé 11 heures du soir, ce qui est assez habituel dans un pays aussi sociopathe que la Chine, mais au moins 95% du temps quand tu confrontes un Chinois et lui dit “Arrête ça sti” il obéit, pas nécessairement par réalisation d’avoir fait de quoi d’impoli et antisocial, mais par sens de non-confrontation. Mais là, cette gang de Tibétains, au lieu de farmer leurs sacrament de calisse de yeules et nous laisser dormir, se moquent de nous, nous lâchent des insultes en chinois cassé et se mettent a chanter plus fort. Meme mes beaux-parents dans la chambre d’à côté, si patients et resignés aux fatiganteries constantes de leurs compatriotes d’habitude, sont exaspérés. Je considère leur balancer ma bouteille de bière vide à l’aveugle, mais je me dis que ça va mener à de l’escalation que je suis sûr de pas gagner, ayant bin plus à perdre (me faire mettre en prison ou déporter, avoir à payer un “dédommagement”, etc.) alors que si, admettons, la police se pointait, chus sûr qu’ils les arrêteraient même pas, vu que tout ce qu’ils possèdent est quelques poules et du linge beurré de bouse de yak. Je channel le bouddhiste zen en moi, me disant que j’aurai decrissé de là le lendemain alors qu’eux autres sont pognés là jusqu’à fin de leurs jours, et finis par m’endormir.

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On est proches de la vallée de la Rivière Nu, qui veut dire “enragé”. C’est en effet une grosse rivière au flot rapide et à l’eau brune comme du café au lait, avec tous les debris qu’elle ramasse. Ce serait la chose la plus cool de la descendre en kayak. On conduit d’un belvédère à l’autre, sortant pour marcher sur les sentiers et ponts suspendus. À l’un de ces spots, j’arrête m’asseoir à une petite table en roche, et je suis rempli de joie en apercevant quelques petits shooters de baijiu encore scellés, que les mononcs qui ont brossé la la veille ont juste oubliés ou laissés! J’en cale un, meme si il est à peine 10:30 et chus en manque de sommeil. Monsieur Jin prend tous les autres et les emmène vers le char, j’insiste pour en laisser une couple, question de donner de la joie au prochain randonneur alcolo qui passe.

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Le milieu de la journée est très lazy, on se rend à un minuscule village et on check leurs maisons, ça a pas vraiment l’air d’un site touristique ordinaire alors je me sens un peu bizarre à rentrer chez ces gens, avec les grand-mômans qui font la cuisine et les hommes qui réparent des sections de leurs maisons en bois. Il y a un restaurant très “terroir” sur la petite plaza principale, on commande quelques specialités du coin, surtout des champignons et plantes de montagnes, et aussi du boeuf salé qui fait penser à du bacon. Il y a un temple au sommet de la colline, avec le toit qui courbe comme le style chinois, mais surmonté d’une croix. Je me fais dire que ces gens, la minorité ethnique appellée Nu comme la rivière, sont chrétiens. Je maintiens mon buzz de baijiu matinal, clanchant plusieurs bières et verres de leur alcool maison, qui fait penser à celui que je buvais en Thaïlande et au Laos.

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On est vraiment pas loin des frontières avec le Myanmar et le Tibet, ce qui fait que quelques postes de contrôle avec des soldats armés se trouvent sur notre route. Comme d’habitude, ils sont complètement confus en voyant mon passeport, et faut je les aide a enregistrer mon information. À l’un d’eux, on se fait dire que le Tibet est juste à 15 km en avant, juste passé le belvédère sur la Riviere Nu où on se dirige. Yesss!!! Dans ma quête de visiter tous les territoires et provinces de la Chine, le Tibet m’a toujours echappé, parce que ça me tente crissement aucunement de payer pour une visite guidée chère obligatoire, d’avoir mes mouvements limités comme si j’étais un chien en laisse, de me faire charrier avec une gang de Tim Budongs, de vieillards, de touristes spirituels (vomi!!!) et de me faire lecturer condescendemment une version watered-down, approuvée par le ouernement central, de la culture de cette région par un guide aux dents noires qui parle broken English. Mais là j’ai ma chance!!! Je mets un pied de l’autre bord de la ligne, un seul, au site marquant la délimitation avec d’énormes caractères en les deux langues, gravées dans le roc de la falaise.

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De retour au bled, on a une réservation dans un hôtel non-insalubre et, espérons-le, loin des pelleteux de fumier bruyants. Il est tenu par un jeune couple venu du centre de la Chine, et quand on leur raconte les mésaventures de la veille, ils disent d’emblée que leur hôtel flat-out accepte pas les Tibétains, parce qu’ils dérangent tout le monde et sont malodorants (lol). On mange un excellent repas sur la terrasse et on se couche tôt, en manque de sommeil de la veille et (dans mon cas) après avoir bu toute la journée, et aussi parce que la route de demain est longue, la plus longue en fait.

Shangrila doit etre une des villes les plus fake j’aie vu de ma vie, meme son nom est fake. Le nom “Shangrila” est fictif, provenant d’un roman anglais qui parle d’une ville paradisiaque située vaguement au Tibet (que l’auteur a jamais visité), et un ministre chinois quelconque, il y a quelques années, a decidé de renommer cette ville question de convaincre les touristes potentiels que c’est un plus gros deal. Et ça marche, chapeau! La vieille ville, d’ampleur beaucoup moindre que celle de Lijiang, a passé au feu en 2013, donc quasiment tous les petits buildings pittoresques sont des repliques rebâties. Mais à bin y penser, c’est-tu si pire que ça? C’est quoi les autres options, laisser un tas de charcoal comme tel? Rebâtir en béton pis en vitre pis en poutres d’acier? Fuck that, l’architecture sino-tibétaine en boiseries est bin plus jolie, et en bonus, les gens qui y opèrent des magasins et restos et hôtels peuvent bénéficier de plomberie et d’électricité moderne plutôt que le bric-à-brac tout croche rajouté à l’arrache dans des vieux taudis de 300 ans.

Même si Lijiang est plus grosse, elle m’avait fait l’impression de petit bled de frontière, à cause du changement de paysage après être arrivé de la région densément peuplée et developpée qui est l’est de la Chine. À cause du même phenomène, mais l’inverse, Shangrila me semble comme une grosse ville, après avoir descendu des montagnes. Je suis donc content de pouvoir aller manger des boulettes de falafel et un hamburger, question de faire changement un peu. Pas qu’on aie eu un seul mauvais repas à date, même dans les recoins reculés; ce cocu à face-à-fesser-dedans Anthony Bourdain disait bien des niaiseries dans son show de TV pour matantes, reste qu’il avait raison sur un point, si (ou quand) les Chinois prennent le contrôle du monde, au moins on mangera bien.

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Le Parc National de Pudacuo, à quelques kilomètres en dehors de la ville, est plutôt charmant et une bonne façon de passer quelques heures. Quelques sentiers traversent la forêt ou font le tour d’un lac, et évidemment il y a des yaks, magnifiques puissantes bêtes avec leurs cornes luisantes et leur robe de laine noire qui leur tombe aux genoux. Ils broutent innocemment, indifférents à tous les humains sur la passerelle qui traverse leur champ.

Un moment donné, un incident cocasse survient: une grand-môman dit à une petite fille d’une dizaine d’années “Descends pis va à côté de la vache! On va prendre une photo!” meme si y a des pancartes partout (et le fucking common sense) qui l’interdisent. Je dis à la fille de pas faire ça, c’est un animal dangereux, elle fige pendant trois secondes, se retourne et dit “Maman! L’étranger me dit que la vache est dangereuse, c’est tu vrai?” et sa mère de rétorquer “Dis pas ça! Dis que le monsieur t’a dit ça!” avant de me regarder d’un air gêné et de s’excuser de l’impertinence de sa petite fille. Ça m’avait offensé aucunement, vu qu’elle a utilisé le mot de dictionnaire pour “étranger” au lieu d’une vocifération raciste. Reste que c’est nice des fois de pas se faire ostraciser, et de voir les efforts des parents chinois du 21e siècle d’inculquer a leurs enfants que les rares individus à long nez ou à peau foncée ou aux cheveux frisés pas noirs qui défilent dans leur environnement sont pas des animaux de cirque, mais des humains. Aussi elle a appris des notions de prudence pour ce qui est des gros animaux imprévisibles, de respect des règles de parc national, et en bonus, ça a bien fait chier la vieille, qui me regarde fixement avec sa face toute froncée, choquée de voir que des fois, la voix de la raison prend le dessus sur le confucianisme et le respect aveugle des vieillards et de leurs lubies séniles.

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Ensuite on va au Temple Songzanlin, qui est énorme, avec ses nombreuses chambres et corridors peinturés de fresques ou ornés de cossins bouddhistes dorés, et des moines au crane rasé en robes noires. C’est assez impressionant, quoique comme à chaque fois je peux pas m’empêcher de trouver tant d’opulence un peu obscène lorsque juxtaposée aux shacks un peu tout croches de Xiao Zhongdian (petit Zhongdian, Zhongdian étant l’ancien nom de la ville avant qu’elle change pour Shangrila) qui l’entourent. C’est doublement bizarre d’une religion qui prône l’ascétisme et l’austerité comme le bouddhisme, mais bon, c’est un sujet qui a déjà été battu à mort.

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En soirée on va manger du yak en soupe, qu’on prépare nous-même dans un gros pot au milieu de notre table. Je trouve un peu désolant que dans une place pastorale comme ça où ils ont évidemment de la viande de qualité, ils mettent presque tout le temps un intermédiaire, sous forme d’eau, entre le feu et la viande. J’imagine que c’est une combinaison de la nature de leur combustible, le manque d’épices, et le fait qu’il fait frette en hiver et frisquet en été et que donc ils veulent du bouillon, qui fait que ces gens ont plus tendence à faire de la soupe que des grillades. C’est pas mauvais, très bon même, mais messemble je mangerais un steak au lieu.

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Une autre longue route s’amorce, vers notre derniere destination, le Lac Lugu, où une autre minorité ethnique, les Mosuo, se sont établis et menaient une existence insignifiante de pêche et d’agriculture de subsistence avant que les hordes de touristes arrivent. Depuis, ils font la grosse piasse, à opérer des hôtels et restaurants et à avironner leurs chaloupes. Les bateaux à moteur et même la baignade sont interdites complètement, question de protéger la clarté de leur eau, ce qui est admirable. Le lac et le paysage qui l’entoure sont magnifiques, même si je viens du pays des 100 000 lacs et que j’ai la tête saturée de toutes ces vistas de montagnes de 6000 m, vallées sans fond et villages tibétains à flanc de montagne qu’on vient de voir dans les 10 jours précédents. Une dernière étape agréable avant de retourner à Lijiang prendre l’avion.

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