Quand chus allé au Kenya, le vol le moins cher avait une escale de 15 heures de temps au Caire, en Égypte. Avoir une escale aussi longue peut être un bien agréable bonus, et dans le passé, j’ai visité des villes comme Melbourne, Philadelphie, Dubai, Doha, Panama pour quelques heures ou un jour ou deux en chemin vers quelque part d’autre… mais ça peut aussi être une gigantesque perte de temps, comme quand j’ai passé 12 heures enfermé à l’aréoport de Moscou, incapable de sortir à cause que j’avais pas de visa de transit.
Mon escale au Caire est synchronisée avec la clarté du jour, et je peux obtenir un visa à l’arrivée, mais nous sommes en 2013, et le pays est aux prises avec une quasi guerre civile. Les sites comme Wikitravel ont un WARNING en grosses lettres rouges et les ambassades de pas mal tous les gouvernements suggèrent à leurs ressortissants de pas mettre les pieds là. Je prends le pari quand même et j’achète mon billet d’avion quelques mois avant mon départ, en me disant tant mieux si ça calme pis que je peux aller faire un petit tour, et qu’au pire je vais juste végéter dans l’aréoport pis manger du hummus. Je check les nouvelles à chaque semaine, et ça regarde pas bin: le 1er juillet, quelques jours avant mon départ, des militants anti-Morsi ravagent le QG de la Fraternité Musulmane, des protesteurs masqués ont pris le contrôle de la Place Tahrir, et l’armée a issu un ultimatum, menaçant d’intervenir si les partis politiques arrivent pas à s’entendre. Si il y a un pire esti de moment pour aller visiter l’Égypte, c’est drè-là.
Et là est le moment où le blogueur de voyage sort un esti de sacrament de cliché prétentieux du genre “…mais chus pas un touriste comme les autres!” ou “…danger is my middle name!” ou une autre niaiserie. Mais comme j’ai dit, c’est juste une série de coïncidences: je veux aller en Afrique, et le seul vol qui fait du sens est avec EgyptAir et cette escale.
Première chose je fais en arrivant là est de trouver un kiosque d’information, où je m’enquiers de la situation en ville. Un moustachu sort une carte de la ville et montre où ça brasse, mais me dit que dans le reste de l’énorme métropole, c’est plus ou moins business as usual. Ça inclut la banlieue de Giza, où les pyramides sont, évidemment la place où j’ai le plus le goût d’aller. Ça me convainc en masse, et je me mets en chemin.
Je paye 20 piasses pour un visa, passe les douanes, change une petite pile de cash pour des livres égyptiennes, et je sors dans la chaleur suffocante. Immédiatement, un fren indésirable commence à me bourdonner autour comme une mouche à marde autour du cul d’un cheval, me proposant ses services de guide et chauffeur. So pitch est bien rodé, avec des photos laminées et un permis “officiel”. Je refuse son offre poliment, en disant que je vais prendre le bus au lieu. “There’s no bus! You have to go by taxi! Come with me, only $85 for the day!” Ce qui pourrait bien être un prix raisonnable, ou juste un montant de base sur lequel va s’empiler une parade sans fin de frais d’autoroute, billets pour les sites touristiques, pourboires obligatoires, visites à des magasins de babioles, bakshishes, et autres moyens de m’extirper le plus d’argent possible. De toute manière, chus pas très intéressé, étant plus du genre à voyager indépendemment.
Non merci, lui dis-je, et je lui demande d’où part l’autobus.
“No bus, I tell you! Where are you from, my fren? Australia? Germany?”
Je soupire, et retourne dans le terminal et un autre kiosque d’infos occupé par un monsieur moustachu à l’air bête. Bien sûr, le fren m’emboîte le pas, continuant d’essayer de me convaincre même si je l’ignore totalement. Quand je demande des infos au sujet des autobus, il lâche des calls en arabe et c’est pas difficile d’imaginer ce qu’il dit. Heureusement, Monsieur Moustache se calisse de lui, et me dit de sortir, attendre pour la navette qui fait le circuit de terminal en terminal, et de sortir à la station d’autobus, qui sera clairement visible. Je le remercie et me mets en route.
La mouche à marde persiste avec persévérance et désespoir. Avec diplomatie, je lui dis “Look, you’ve lied to me about the bus. How can I trust that you won’t be lying to me about other things?” et il répond d’un air gêné qu’il essaie juste de travailler et de gagner de l’argent pour sa famille, les temps étant durs avec le petit nombre de touristes ces temps-ci. Je sais pas si c’est parce que j’ai nulle part où aller avant que la navette arrive, où parce que mon moral est haut en ce début de vacances, où alors parce que plusieurs années à voyager dans le Tiers-Monde m’ont donné une perspective d’ensemble et ont brouillé la ligne entre “crosseur” et “bonhomme qui l’a pas facile et essaie juste de gagner sa vie”, mais je lui ai serré la main et souhaité bonne chance au lieu de l’envoyer chier.

La station d’autobus s’avère être pas grand chose de plus qu’un parking poussiéreux avec une flotte de vieux minibus tout croches avec un langage d’extra-terrestres imprimé sur les pare-brises. Même les chiffres sont bizarres, moi qui pensais que les symboles qu’on utilise (1, 2, 3…) s’appellent les chiffres arabes, bin au lieu ils ont des espèces de pattes de mouche du genre ١, ٢, ٣ et chus tout perdu. Après quelques essais infructueux, je trouve un monsieur qui parle anglais et m’indique quel bus prendre. Et ça c’est la première surprise: vu que l’Égypte est une ancienne colonie britannique, et avec mes expériences avec les Égyptiens que j’ai rencontrés à l’étranger (ce qui veut pas dire grand chose, mais quand même), je pensais être capable de me démerder en anglais un peu plus facilement, surtout que je suis même pas encore sorti de l’aréoport. Je suis pas en train de chiâler, hey, c’est leur pays, je suis juste un peu surpris, c’est tout.
Je paie 2 livres (à peu près 40 cennes canadiennes) pour un billet écrit à la main, et le bus se met en marche en crachant un nuage grisâtre épais. Ça prend une éternité pour se rendre au centre-ville, mais la ride est très plaisante. C’est ma première fois dans un pays arabe, et ma face est collée à la fenêtre, absorbant la vue et l’ambiance: le paysage désertique, le monde qui conduit comme des psychopathes, les gros panneaux publicitaires avec des fois une fille en burka et d’autres fois une fille en robe d’été avec les cheveux au vent, et le plus qu’on s’approche, une densité croissante de buildings bruns carrés et de mosquées, jusqu’à temps qu’on soit bin pognés dans le trafic.
Éventuellement on se fait débarquer à une place piétonnière grosse comme un terrain de soccer avec des milliers de gens qui marchent dans toutes les directions, et en suivant la foule et mon instinct, ainsi qu’avec l’aide d’un jeune homme qui parle zéro anglais comme moé je parle zéro arabe, j’arrive à la station de métro et je figure comment aller à Giza. Leur métro (un des trois seuls dans toute l’Afrique, les autres étant à Alger et Casablanca; aucun est en Afrique Noire) a l’air d’être pogné en 1980 et a quasiment pas d’anglais nulle part mais m’emmène au terminus de la ligne, où je suis rendu à six kilomètres des pyramides. Je décide d’y aller à pied, je sais que le site est plein sud, donc je m’oriente avec le soleil et je trouve quel boulevard se dirige vers là.

Je pense pas jamais avoir été à une place aussi chaotique, avant d’aller en Inde quelques années plus tard. Il y a des centaines d’individus dans toutes les directions, et ils parlent FORT. Ayant vécu en Chine depuis un bout, je pensais que les Chinois (surtout les Chinois du nord) sont le peuple le plus bruyant au monde, mais là mes oreilles qui saignent quasiment remettent ça en question. Le fait que la langue arabe sonne aussi rough aide pas les choses. Malgré tout ça, je suis tranquille et j’ai un gros sourire dans la face, complètement innondé de tous ces sons et images et sensations, addicté au voyage comme je suis. Je suis en train de recevoir mon fix, aucun doute là-d’sus.
Un autre surprise est comment tiers-monde la place est. Les chars sont vieux, tiennent avec du duct-tape et crachent de la grosse boucane noire opaque, les buildings tombent en morceaux, les trottoirs sont tout craqués, et il y a des gros monticules de vidanges partout, pourissant au soleil en émettant une odeur nauséabonde. Moi qui pensais que l’Égypte est un pays émergent, et que ça ressemblerait aux pays d’Asie ou du Proche-Orient qui sont clairement pas aussi riches que l’Europe mais quand même pas un fouillis total.
Une chose est sûre cependant, à part le chaos tiers-mondesque urbain, il y a aucun signe de l’instabilité politique qui est aux nouvelles. Le monde vit leur vie et personne semble me remarquer, même si je suis assez visible.
Je continue mon chemin, arrêtant à un petit café tout crado rempli de moustachus fâchés pour manger des beignets sucrés et un jus d’orange, et peu après je vois le tip d’une des pyramides, entre deux blocs appartements bruns. Je fais un saut en voyant comment haut c’est, et ça me prend une autre demi-heure de marche pour arriver à la lisière du quartier, ces pyramides sont vraiment énormes.
Je suis après attendre à une lumière rouge quand un monsieur entame une conversation. Il a la quarantaine, moustachu (évidemment), est habillé plutôt formellement malgré la chaleur, et est accompagné d’un ninja. Il parle anglais comme quelqu’un qui l’a appris et utilisé surtout dans un contexte académique, et me dit qu’il est professeur d’université à Alexandrie. Son épouse a jamais vu les pyramides donc il l’emmène là, ensemble on se rend à une ruelle où il connaît un guide. Je pensais aller sur le site seul et juste me promener, et j’avais lu en détail au sujet des milliards de crosseurs, scammeurs, crottés, mouches à marde, pickpockets, voleurs, menteurs et mange-mardes en quoi l’industrie touristique du coin consiste, mais le monsieur universitaire semble digne de confiance alors je le suis, au pire y a rien qui m’oblige à rebrousser chemin.
Son contact est un bonhomme bedonnant bien gentil, et il me propose un tour guidé à cheval pour l’équivalent de 30 piasses, ce qui couvre tout, juste le prix d’admission étant 12 piasses. Ça semble être un bon deal, et j’accepte. Le prof et le ninja, pour leur part, paient pour un tour plus long qui les emmène creux dans le désert. On se serre la main et on se sépare.
Mon guide se nomme Ahmed, le neveu du bonhomme bedonnant. Il a 25 ans environ, handsome avec un gros sourire (il ressemble au chanteur de reggaeton Daddy Yankee), parle un anglais impeccable et possède beaucoup de connaissances au sujet de cette place. Comme n’importe quel moron qui a été à l’école, je sais vaguement que les pyramides sont les tombes de pharaons d’il y a 5000 ans, mais ça s’arrête à peu près là. Alors que nos chevaux nous transportent lentement dans le désert après être entrés par une petite guérite occupée par un dude en uniforme qui inspecte les billets, Ahmed me donne tous les détails, parsemés de petites anecdotes comiques qui donnent l’impression d’avoir été dites mille fois mais qui me divertissent et m’informent bien quand même.

On trotte jusqu’au somment d’une dune avec une vue assez incroyable sur tout le site, et encore une fois ma yeule ouvre en voyant comment fucking gigantesques les trois grosses pyramides sont et en pensant à combien de travail ça a dû prendre, le genre de choses qui a engendré des mythes et légendes incluant des sources supernaturelles ou extra-terrestres. Aussi le fait qu’on compte leur âge en millénaires et qu’on l’arrondit au 1000 ans le plus proche, alors que Québec a à peine 400 ans et est une des villes les plus vieilles de toute l’Amérique. Ça met les choses en perspective!
Le site est quasiment vide, aucune idée de comment bondé il peut être en temps normal mais là on l’a quasiment à nous seuls, avec juste quelques petits groupes de touristes. Je commence à grimper une des pyramides, supposément que dans l’temps elles étaient parfaitement triangulaires mais après des siècles de pillage et d’exposition au soleil la couche de roche lisse a été complètement érodée et là on dirait des gros escaliers, une fois rendu proche. Je grimpe quelques étages mais j’arrête quand un garde de sécurité s’en vient vers moi, l’air pas trop trop content.

On se promène un peu plus, jusqu’au Sphinx, qui lui est pas mal plus petit que j’imaginais. Ahmed me dit que la visite tire à sa fin, et sort le speech inévitable comme quoi si j’ai aimé ça je peux le tipper, peu importe combien, 100 dollars, 200 dollars, ce que je vois comme raisonnable.
What the fuck?! Il veut dire des livres égyptiennes, right? (Le taux est d’environ 6 au dollar). Je lui tends un billet de 100 EGP, en guise d’appréciation pour son travail. Je pensais il serait content, mais au lieu il pète une sacrament de coche et a l’air aussi en maudit que si je venais de lui sacrer une claque. Il me traite de cheap, d’ingrat, me dit que je mérite pas de visiter son pays. J’y réponds que 100 c’est pas mal d’argent (à date, j’ai dépensé 2 EGP pour le bus, 2 EGP pour le métro et 6 EGP pour mon déjeuner, faque clairement qu’un billet de 100 gagné en 45 minutes de travail est pas un mauvais deal dans cette économie) et que je suis juste un honnête prof de secondaire, pas un homme riche. Il s’en calisse, et va même jusqu’à me dire de reprendre l’argent, si je suis pour être un aussi gros cheap-ass.
Pourquoi j’ai pas juste arraché de ses mains sales le bill de 100 qu’il me tendait et que j’ai pas juste décalissé sans me retourner? Fouille-moé. Une combinaison de ma satisfaction jusqu’à ce moment-là, de la petite dose de white guilt toujours présente quand je voyage dans un pays pauvre, pis aussi le fait que si je callais son bluff et que je faisais ça, il se mettrait sûrement à crier en arabe que je l’ai volé ou que j’ai insulté sa soeur où je sais pas trop quelle marde, et je me retrouverais entouré par une gang de vermines.
Faque je lui laisse garder le cash. Il sait que je sais quelle game il joue, c’est pas mon premier ni mon dernier rodéo. Évidemment, il est pas mal plus froid pour le reste de la visite, qui est pas mal juste de retourner le cheval à l’écurie avec un détour dans un magasin de babioles où il essaie sans succès de me faire acheter des cossins.
Mon moral est encore haut. Ahmed et les autres sangsues peuvent manger un char de marde, mais je viens de voir les pyramides pis le Sphinx faque ma journée est déjà plus que bien remplie, et il est à peine 11 heures. Mon vol pour Nairobi part à 21 heures, qu’est-ce que je vais bin faire d’ici là?
Je me rends à un bureau d’information touristique et je demande comment est la situation en ville et quels endroits valent la peine de visiter. Le serviable monsieur moustachu (je pense que j’ai juste vu cinq Égyptiens mâles adultes qui avaient PAS de moustache alors je vais omettre ce détail redondant à partir de maintenant) me dit que le musée national est ouvert aux touristes et est sécuritaire, vu qu’il est dans la zone contrôlée par l’armée. Il me donne une mappe avec un cercle autour du musée, et me dit à quelle station de métro débarquer. Il encercle aussi Tahrir Square et me dit de pas aller dans ce coin-là, vu que c’est là que les manifestants sont barricadés.
Je m’attendais quasiment à ce qu’il me recommande la compagnie de taxis à son cousin et me dise qu’il peut m’emmener là (good price for you, my fren), ou me demande carrément de l’argent pour ses infos ($5000, $10 000, doesn’t matter how little, my fren) mais il fait juste me souhaiter une bonne journée.
Faque je marche jusqu’au boulevard et j’embarque dans un autobus poussiéreux plein de ninjas multicolores, et je sors à la station de Giza où chus arrivé quelques heures auparavant. J’achète de la bouffe de rue graisseuse et je figure comment me rendre à bon port.
Quand le monsieur de l’info touristique a dit que le musée est dans la zone contrôlée par l’armée, ce qu’il aurait dû dire est que le musée EST la zone contrôlée par l’armée. La rue d’en arrière a une ligne de tanks bumper-à-bumper, et la cour clôturée est complètement envahie avec des tentes et structures temporaires. Des centaines de soldats en armes se promènent. C’est à la fois rassurant et super inquiétant.

Mais le musée est ouvert. C’est une des visites les plus bizarres j’ai jamais faites, avec les halls complètement vides, les seuls visiteurs étant un vieux monsieur européen aux cheveux blancs et des jeunes Arabes en uniforme qui prennent des selfies avec les momies. Les soldats qui sont pas sur le shift de jour sont libres de se promener dans le musée, et quelques-uns viennent me voir curieusement et ceux qui parlent un peu anglais me font la conversation, me demandant pourquoi chus là. Les étrangers sont rares en cette période turbulente, j’ai ai vu genre cinq depuis je suis parti de l’aréoport.
Je prends mon temps, admirant l’immense collection d’artéfacts de cette civilisation vieille de plus que cinq millénaires. En sortant, un officier m’approche et me demande si j’ai aimé la visite. Il parle un anglais parfait et est bien amical, alors je reste à lui jaser.
“Are you going to see Tahrir Square?”
“Hmmm, isn’t it supposed to be dangerous?!”
“Not at this time of the day. It’s too hot! Protesters are lazy, they don’t show up until it cools down, around 5 o’clock. You can go if you want.”
Faque un major dans l’armée égyptienne me suggère d’aller checker un des épicentres les plus turbulents des émeutes du Printemps Arabe. What can go wrong? Il me pointe la direction et me souhaite bonne chance.
Ça s’avère être à juste quelques coins de rue. Je marche à côté de la longue ligne de véhicules blindés avec des soldats casqués qui m’envoient la main, je traverse un boulevard, et j’arrive à des barricades qui bloquent les véhicules. Passé ça, le gros boulevard est donc vide, et les trottoirs sont couverts de drapeaux égyptiens et de bannières. Il y a juste quelques personnes, et aucun semble être sur le point de partir une guerre ou une révolution. C’est très tranquille, trop tranquille.

Le square lui-même est un peu plus vivant. Le rond-point est une grosse pile de tentes, et quelques manifestants sont assis ici et là, tous des mâles entre 15 et 30 ans. Certains me pointent à leurs chums et ils me regardent avec curiosité, mais personne a l’air hostile. Quelques sourires et signes de la main, mais la plupart m’ignorent.
L’ambiance est pas juste relax, mais un peu festive: une guitare ou deux joue des mélodies, et une gang de gars en dessous d’une toile qui les met à l’abri du soleil tapant chantent. Il y a même des carrosses de crème glacée!
Mais aucun fucking doute là-dessus, on parle d’un site de manif. Les murs sont couverts de graffitis, le sol est couvert de déchets et de flyers et le drapeau noir, blanc et rouge est partout. Il y a des bannières, surtout en arabe mais certaines sont en anglais. Une dit “Western media, Shame on you. 30 million protesters, and you dare call it a coup?!”, une autre traite le président Obama de international terrorist, et une dit non verbalement mais clairement qu’ils haïssent le gouvernement américain mais pas le peuple.

Un adolescent maigrichon et souriant m’approche et me donne un petit drapeau, et quand je le prends et le shake un peu de bord en bord, une gang de gars applaudissent et m’encouragent. Mais après ça, je fais quelque chose de très, très cave: un autre individu me donne une pancarte, un morceau de bois avec un carton broché dessus couvert de texte en arabe. Je lui demande c’est quoi, mais il parle pas anglais. Il sort une caméra digitale, la pointe, et fait oui de la tête. Je hausse les épaules et je pose. Rendu là, je suis entouré de petits groupes, et plusieurs me prennent en photo avec des caméras ou des téléphones.
C’est pas mal là que je me rends compte que je suis un peu voyeur et que j’ai aucune affaire là. La majorité des gars sont encore amicaux mais je commence à voir des sourcils froncés et des regards pas très accueillants, surtout de la part des plus vieux et de ceux qui ont l’air plutôt rough, avec des foulards de désert ou des bandanas autour de la tête.
Qu’est-ce que je calisse là?! J’ai aucune idée ce que la pancarte dit, si c’est une incitation explicite à la violence, et que je suis là à poser pour la caméra comme une pute en manque d’attention. J’aurais clairement pu aboutir en première page du journal comme un demeuré.
…ou peut-être pas. Quoi qu’il en soit, même si ça fait juste dix minutes que je suis là, la foule commence à épaissir et je me dis il est temps que je m’en aille.
“Brother! Are you going to stay here for the big protest tonight?”
Je sors une excuse comme quoi il faut j’aille prendre l’avion, ce qui est pas faux. Je serre une centaine de mains tendues et je marche vers le Nil.
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